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Burkina: Compaoré, ex-président putschiste renversé par la rue
L'ancien président du Burkina Faso Blaise Compaoré, rentré jeudi à Ouagadougou après huit ans d'exil en Côte d'Ivoire, avait pris le pouvoir en 1987 par un putsch et a régné sans partage pendant 27 ans, avant d'être poussé au départ par la rue.
Au lendemain de violentes émeutes populaires et sous la pression de l'armée et de l'opposition, Blaise Compaoré avait dû se résoudre à partir en octobre 2014.
Militaire de carrière, il avait pris le pouvoir en 1987 lors d'un putsch au cours duquel a été tué l'homme fort d'alors, Thomas Sankara, dont il était un ami d'enfance et le plus proche compagnon: il l'avait aidé à prendre le pouvoir par la force quatre ans auparavant.
Après six mois d'audience, le tribunal militaire de Ouagadougou a condamné en avril Blaise Compaoré par contumace à la prison à perpétuité pour son rôle dans l'assassinat de Sankara.
Né le 3 février 1951 à Ouagadougou, appartenant à l'ethnie mossi --la plus importante du pays-- le "beau Blaise", comme il était surnommé en raison d'un physique avantageux, homme discret parlant peu, grand amateur de football, a 36 ans lorsqu'il prend le pouvoir.
Après la "rectification" au début de son règne, destinée à tourner la page des années Sankara et marquée par l'élimination d'opposants, Blaise Compaoré quitte l'uniforme et, en 1991, rétablit le multipartisme.
Il a modifié par deux fois la Constitution: en 1991, pour instaurer l'élection du président pour un mandat de sept ans renouvelable "une fois", expression supprimée en 1997 permettant ainsi un exercice du pouvoir à vie.
Mais "l'affaire Zongo", du nom d'un journaliste retrouvé mort avec trois autres personnes alors qu'il enquêtait sur un meurtre impliquant le frère du président, provoque une grave crise politique peu après sa réélection en 1998.
En 2000, la Constitution est de nouveau amendée: le septennat devient quinquennat, renouvelable "une fois".
Le Conseil constitutionnel autorise toutefois la candidature de Blaise Compaoré en 2005, au nom de la non-rétroactivité d'une révision de la Loi fondamentale.
M. Compaoré devait terminer en 2015 son second quinquennat, après avoir effectué deux septennats (1992-2005).
Le projet de loi qui a enflammé le Burkina prévoyait de faire passer de deux à trois le nombre maximum de quinquennats présidentiels.
Selon ses détracteurs, ce changement aurait permis au président du "pays des hommes intègres" de rester quinze ans de plus au sommet de l'Etat.
- Pacte avec les jihadistes -
Blaise Compaoré, qui figurait en sixième position des présidents africains en terme de longévité, est crédité d'avoir placé son petit pays enclavé au coeur de la diplomatie africaine, en s'imposant comme l'un des grands médiateurs dans les crises qui agitent le continent.
Il lui a également épargné la violence de groupes jihadistes qui ont commencé à déstabiliser les pays du Sahel dans les années 2000.
Pour y parvenir, il est accusé d'avoir passé un pacte avec ces groupes afin de préserver son pays des attaques jihadistes, aujourd'hui de plus en plus nombreuses et meurtrières.
Pendant son règne, il dispose d'une solide image à l'étranger, notamment en France, malgré des trafics d'armes et de diamants avec les insurrections angolaise et sierra-léonaise épinglés par l'ONU, ou sa proximité avec le défunt "Guide" libyen Mouammar Kadhafi et le dictateur libérien Charles Taylor.
C'est surtout en interne que le pouvoir du dirigeant burkinabè a été le plus sérieusement contesté.
De mars à juin 2011, la quasi-totalité des casernes, y compris la garde prétorienne du chef de l'Etat, se sont mutinées, parallèlement à des manifestations populaires, ébranlant le régime et forçant le président à quitter momentanément la capitale.
"Son entourage et lui lisent très mal les mutations psychologiques et sociales de la population. Ils continuent à penser que les choses sont comme dans le passé et qu'il est toujours assez fort. Mais en réalité, la confiance, le soutien dont il bénéficiait se sont estompés", estimait alors le politologue burkinabè Siaka Coulibaly.
L'ex-président a notamment sous-estimé la lassitude d'une grande partie de la jeunesse, dans un pays où la majorité des vingt millions d'habitants ont moins de 25 ans et n'avaient jamais connu d'autre régime que le sien.
P.Silva--AMWN