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A Baltimore, des habitants choqués par l'effondrement de leur grand pont
Dans sa station-service en périphérie de Baltimore, Patricia Sisk voit généralement passer à l'aube des routiers habitués et des parents pressés. Après l'effondrement spectaculaire mardi d'un grand pont à moins de deux kilomètres et demi, c'est un ballet de policiers, secouristes et clients choqués.
"C'est effrayant", confie cette Américaine de 82 ans à l'air affable sous sa casquette de travail. "Quand je suis arrivée, on m'a raconté. J'ai vu toutes ces forces de police et ils m'ont dit ce qu'il s'était passé. Et vous savez, je compatis avec tous ces gens", poursuit-elle alors que le son des sirènes résonne autour du petit supermarché de la station-service, sur la côte Est des Etats-Unis.
La police et les secours ont été déployés en masse autour du pont Francis Scott Key, bloquant les routes qui y mènent pour des raisons de sécurité, l'accident étant "majeur" a indiqué à l'AFP un représentant des secours sur place.
Cet important pont autoroutier de Baltimore s'est effondré tôt mardi matin après avoir été percuté par un porte-conteneurs, entraînant des véhicules et des personnes dans sa chute. Les secours recherchent selon le dernier bilan au moins six victimes dans l'eau et sur le fond marin, autour de l'immense structure métallique tordue.
Selon le gouverneur de l'Etat, le navire, qui a rencontré un problème technique, a réussi à lancer un appel à l'aide aux autorités avant de percuter le pont, ce qui a permis de couper une partie du trafic routier et de sauver des vies.
Patricia Sisk dit n'avoir pas éprouvé une telle sensation de peur depuis les attentats du 11 septembre 2001, qui ont tué près de 3.000 personnes et traumatisé les Américains. "Vous savez quand les tours... c'est juste ce sentiment un peu glauque", explique l'octogénaire d'un ton calme mais inquiet.
- "Panique, peur et tremblements" -
A la caisse, Patricia Sisk passe la matinée à parler de l'accident avec les clients, des habitués à ceux qui sont bloqués en raison des routes barrées par la police, beaucoup lui montrant sur leurs écrans de téléphone les images spectaculaires diffusées sur les réseaux sociaux.
"Tout le monde en parle. Ils ont peur, ils ont cru que c'était une explosion. C'était horrible", continue la vendeuse pendant une pause café.
Parmi les clients, Jennifer Woolf ne montre pas de peur contrairement, dit-elle, à son fils de 20 ans, qui a échappé de peu à la catastrophe. Après une dispute dans la nuit avec sa petite amie, il prend la route furieux depuis Dundalk, de l'autre côté du pont.
Il fait demi-tour pour finalement la retrouver. "Il est passé par le pont une deuxième fois. Et trois minutes après exactement, le pont s'effondre", rapporte sa mère de 41 ans, commandant ses cafés allongés depuis une machine.
"Il est rentré à la maison en panique, en pleurs, tremblant, et j'ai commencé à pleurer aussi", raconte cette entrepreneure au ton assuré, dans un gros pull à capuche rouge. Son fils a refusé de l'accompagner dit-elle, de peur de trop se rapprocher du pont.
- "Jamais vu ça" -
"Il n'a toujours pas dormi, regarde les informations et ne cesse de m'écrire", continue-t-elle, se disant "reconnaissante" que son fils ait échappé au pire. "Je prie pour toutes les familles qui traversent cette tragédie pour qu'elles retrouvent leurs êtres chers".
Avec son petit-déjeuner en main, un grand gobelet de soda et un paquet de biscuits au chocolat, Paul Kratsas assure avoir craint depuis longtemps qu'un tel drame se produise sur le pont.
"Hier, j'ai failli le prendre mais", commence d'un air sûr de lui ce résident de Baltimore de 59 ans, "quand j'y passe parfois, je suis là à espérer que ce truc ne tombe pas, je ne pouvais pas me dire que ça ne pourrait pas arriver". Mais il n'a "jamais vu ça avant", reconnaît-il.
Comme d'autres résidents de Baltimore, il s'interroge sur la quantité de navires qui passent sous le pont. "Ces navires vont et viennent tout le temps. Et ils viennent généralement avec de gros remorqueurs", fait-il remarquer.
Sa femme qui l'accompagne, mais ne souhaite pas donner son nom, met en doute la qualité des infrastructures avant de conclure d'un air ironique: "C'est l'Amérique".
Th.Berger--AMWN